Between sun and moon ❱ DARYL

Mai 2022... Si Daryl avait pas mal de soucis liés à ses problèmes d'argent et ses dettes qu'il avait bien du mal à rembourser, il était néanmoins heureux. Les choses semblaient se débloquer avec son frère alors que cela faisait sept longues années qu'ils s'étaient éloignés. Il avait fallu le bousculer, le pousser dans ses derniers retranchements pour, qu'enfin, il se mette à parler et à s'ouvrir un peu, et leur relation s'était un tantinet apaisée. Pour Daryl, il n'y avait aucune épreuve de la vie qui soit insurmontable en dehors de celle de perdre son double, son jumeau dont il était si proche pendant vingt-six longues années. Les deux frères étaient extrêmement semblables et différents à la fois avec un Matt plus enfantin, plus solaire et un Daryl qui s'était peu à peu fermé avec les années. Et puis Billie était entrée dans sa vie depuis un peu plus d'un an, balayant toutes ses certitudes. Le jeune homme avait toujours été assez frivole dans ses relations avec les femmes, hormis une avant elle. Une relation qui avait duré sept mois mais qui s'était terminée lorsque la demoiselle en avait eu assez de ses secrets, de ses embrouilles, de le retrouver toujours en galère parce qu'il trainait avec les mauvaises personnes. A l'époque, il faisait encore partie du gang de Roberts et elle l'avait récupéré en piteux état plus d'une fois. A présent, les choses étaient différentes. Daryl aurait aimé dire qu'il s'était libéré de ce gang mais même s'il n'en faisait plus partie, ce n'était pas le cas. Il avait toujours une dette à payer, pour son départ et celui de son frère.

Alors oui, des soucis, il en avait par dessus la tête, d'autant qu'une de ses cambrioleuses s'était retrouvée au tapis et ne pouvait pas reprendre le travail avant un moment, mettant encore plus à mal son business, mais il ne se sentait plus aussi seul. Le portoricain avait beau être très entouré, il y avait trois personnes qui étaient nécessaires et même indispensables à sa vie, et sans l'une d'elles, il se sentait incomplet. Il ne s'imaginait alors pas à cet instant que, d'ici quelques semaines, toute sa vie lui serait arrachée, et qu'il ne reconnaitrait plus rien ni personne...  

En cette soirée, au Blue Moon, il ne devait rien se passer d'extraordinaire. C'était une soirée calme de semaine, le monde était plus présent le vendredi et le samedi. Généralement, les clients de la semaine étaient des habitués ou des types qui prenaient l'excuse de réunions ou déplacements professionnels pour venir alors que leurs femmes les attendait. Daryl n'avait jamais vraiment compris l'intérêt de s'enfermer dans un mariage si c'était pour tenter de le fuir ensuite, et puis, lui même s'était marié...Ça lui était tombé dessus sans qu'il ne s'en rende véritablement compte. Est-ce que cela l'obligeait à faire des choix ? Assurément. Le regrettait-il ? Pas le moins du monde. Rares étaient ceux qui auraient pu parier sur le fait que Daryl Roja puisse un jour s'intéresser réellement à quelqu'un au point que cela dure et qu'il lui soit fidèle alors qu'il avait toujours enchainé les relations sans lendemain et avait bien du mal à s'empêcher de flirter dès qu'il voyait une jolie femme. Il ne s'attendait d'ailleurs pas à en voir une en cette soirée. La clientèle du Blue Moon était en grande majorité masculine, mais de temps à autre, une femme passait la porte. C'était plus souvent pour demander un job que pour regarder le spectacle cela dit. Il s'était approché de la jeune femme installée au bar alors qu'une jolie blonde se trémoussait sur l'estrade, récoltant quelques billets dans son décolleté.

Vous appréciez le spectacle ? Lui demanda t-il alors que la serveuse lui apportait sa boisson habituelle avant de se présenter.

Daryl Roja, je suis le patron de l'établissement. Si vous êtes là pour un job, je devrais pouvoir me libérer quelques minutes.  

Une jolie brune aux yeux sombres avec des jambes infinies. La demoiselle était particulièrement sexy et, un peu plus d'un an plus tôt, il était clair qu'il l'aurait draguée et lui aurait même proposé de finir la soirée dans son bureau ou dans la salle VIP. Là, s'il le faisait, ce serait pour un simple entretien, sans arrière pensée, même s'il fallait bien avouer qu'il appréciait ce qu'il avait sous les yeux.

Daryl en avait eu des surnoms dans sa vie, liés à son côté dragueur. Il n'aurait su compter combien de femme étaient venues dans son lit mais il savait parfaitement combien y étaient restées sur la durée. Et les doigts d'une seule main étaient déjà bien trop nombreux pour pouvoir les compter. Il y avait eu son premier "amour" d'adolescent, une jeune femme avec laquelle il était resté durant sept mois avant qu'elle ne prenne la fuite en comprenant dans quel merdier illégal il se trouvait, et il y avait Billie. Il avait toujours été amusant de voir ce contraste entre ses relations avec les femmes et ses relations amicales qui, elles, étaient solides, durables, indéfectibles. Daryl était quelqu'un de très loyal dès lors qu'il s'attachait réellement. Cela semblait juste beaucoup plus complexe quand il s'agissait de sentiments amoureux. Cette alliance, elle était arrivée très vite à son annulaire. En réalité, il ne s'en était même pas vraiment rendu compte. Cela faisait quelques mois seulement qu'il était avec Billie, dans une relation tumultueuse et semée d'embuches qu'il avait lui-même mis sur leur chemin. Il était amusant de voir le changement chez le portoricain dès lors qu'elle était entrée dans sa vie et les craintes qu'il pouvait avoir quant à un hypothétique rejet venant de la brune. Après tout, ce mariage avait pu se faire car elle avait répondu avant que lui-même ne parvienne à formuler réellement la question, se retrouvant dans un de ses multiples blocages émotionnels malgré cette volonté d'aller plus loin.

Oui, Daryl Roja était un véritable handicapé des sentiments. Et c'était sans doute pour cela qu'il était beaucoup plus facile pour lui de charmer que de s'investir réellement. Mais parce qu'on ne chasse pas si aisément le naturel, il avait toujours ce côté un peu séducteur. Si bien des hommes ne se cantonnaient pas à ça, alliance au doigt ou non, lui, il ne dépasserait pas la limite. Il était mordu, un peu trop sans doute pour son propre bien, et comme on dit bien souvent, il se contenterait de regarder le menu. Et c'est ce qu'il fit en cette soirée en voyant une ravissante jeune femme dans son club. Il était assez rare de voir une représentante de la gente féminine en ces lieux hormis pour postuler à l'une de ses offres d'emploi. Il s'était alors approché, se demandant si elle était présente pour le spectacle ou pour espérer faire partie de l'équipe. La brune lui répondit alors qu'elle appréciait beaucoup le spectacle, ses danseuses ayant du charme, ce qui le fit sourire.

Croyez bien que recruter en ce domaine n'est pas aisé et les critères sont plus nombreux qu'on ne pourrait le penser.

Au final, rares étaient les filles présentes à être de simples écervelées qui voulaient se faire de l'argent facile. Beaucoup étaient là parce qu'elles étaient en difficultés, pour payer une dette, des études, pour sortir leur famille de la galère... Quelques unes aimaient simplement danser mais n'avaient pas eu la chance de pouvoir le faire dans le domaine qu'elles avaient espéré. Avoir quelques compétences en danse, de la souplesse, mais également du charme, un corps bien fait et une bonne dose de confiance en elles. Sans cela, elles risquaient de se blesser, de faire des erreurs, de tout simplement ne pas plaire aux clients qui payaient de jolies sommes pour un spectacle qui se devait d'être empli de sensualité. Pour le reste, il fallait bien avouer qu'il y avait une majorité de brunes aux yeux sombres, et cela, à cause des préférences du patron qui avait eu droit à quelques remarques sur ses recrutements. Il en fallait pour tous les goûts ! Il l'avait bien compris, et avait commencé à diversifier tout cela mais il semblerait qu'en cette soirée, il retombait un tantinet dans ses travers ! Il eut un petit sourire lorsqu'elle lui montra son badge, déclinant poliment la proposition sur laquelle il ne manqua pas de rebondir.

L'un n'empêche pas l'autre. Certaines filles ne viennent qu'un soir ou deux par semaine pour dire de boucler les fins de mois ou payer leurs études.
Il sortit alors son portefeuille de sa poche intérieure et y récupéra sa carte de visite qu'il tendit à la jeune femme.

Au cas où vous changeriez d'avis ou que votre métier vous lasserait.

Il s'interrompit l'espace d'un instant avant de reprendre :

Si jamais cela vous intéresse, certaines de nos filles font des représentations en privé. Je suis sûr que Keliah serait ravie de vous avoir comme cliente, lança t-il avec un clin d’œil.