Vamos a la playa

Si j’avais nourri beaucoup d’espoirs sur Liam une fois sa cure terminée, il ne lui aura pas fallu longtemps pour me rappeler que ma mère a raison sur mon optimisme qui frôle la naïveté. Cela fait pas loin de 3 ans qu’il me surprend dans un sens comme un autre avec un art consommé de retomber dans ses travers. Défilé de femmes, légèreté dans sa façon de voir le monde, beaucoup de fête et des états qui me donnent envie de le ramener dans son centre… Même si je suis consciente que le chemin de la rédemption n’est pas une ligne droite et que trébucher est normal, ce n’est pas toujours simple a comprendre son manque de serieux. Je sais bien qu’appuyer sur les déceptions, comme le font ses parents, ne pourrait faire qu’empirer les choses aussi je me concentre plus sur comment réparer les choses et l’aider a passer le cap avec toute la patience dont je suis capable.

Il est officiellement entré dans la vie de Thea. Pour le meilleur comme pour le pire, il n’y a plus de marche arrière maintenant que ma puce sait qu’elle a un papa. Les rencontres se font toujours avec moi, maman, qui ne cache pas son animosité pour lui, ou une assistante sociale. Je veille à ce que tout se passe bien quand il est avec elle et qu’elle ne sache pas vraiment le coté sombre de son papa. Elle est toujours ravie de le voir et un peu triste de le quitter. A côté de ça, je tache de me rendre disponible pour qu’il puisse la voir ou l’appeler sans avoir a se restreindre au planning donné par l'assistante sociale. Je sais que c'est important pour lui et je ne suis pas là pour le privée de Théa.

En ce moment, il a l’air d’aller mieux, même si je ne me leurre pas sur le fait que, comme les bas, ce n’est qu’une étape sur son chemin. Je n’ai pas su lui dire non quand il m’a parlé d’une surprise. Les yeux pleins d’une malice presque enfantine, il m’a juste demandé qu’on passe une journée tous ensemble et de prévoir un pique-nique sans m’en dire vraiment plus. Impossible de lui soutiré un mot malgré mes efforts.

C’est dans la matinée que j’arrive devant chez lui, tenant une Thea surexcitée par la main, trop contente d’étrenner sa nouvelle petite robe a fleur, son chapeau de paille et les mêmes lunettes de soleils, imitation Gucci, que sa mamie, qui ne sait pas faire dans le raffinement. De mo coté, je me suis appliquée a faire a manger pour un régiment, j’ai tout prévu pour ce que je pense être une promenade en forêt, ou a la campagne. Short, chemisier sans manche, le même chapeau que Thea mais des lunettes de soleil plus discrète en plus de tout l’attirail de la parfaite maman, autant pour ma fille que Liam : crème solaire, répulsif a insectes, tire venin, kit de petit bobo et j’en passe. Je suis si loin de l’épreuve qui nous attends quand il ouvre la porte et que Thea lui saute dans les bras avec toute l’impatience de son âge !

« PAAAAAAAAAAAAAAPAAAAAAAAAAAAAAA !! T’as vue !! Je suis trop belle !! J’ai les mêmes lunettes que mamie !! C’est quoooooa la surprise !! c’est quooooaaa ???! »

Plus timidement je salue le jeune homme :

« Salut ! Elle s’est réveillée a 6h tellement elle a envie de savoir et je j’avoue qu’elle n’est pas la seule. »

Vamos a la playa

Emma Lockwood et Liam Keller

“La famille c'est une richesse incroyable, ça donne des outils pour pouvoir affronter les moments extraordinaires, les moments plus difficiles, les hauts, les bas.” - Céline Dion

La vie de Liam avait beaucoup changé en seulement quelques années. Trois ans auparavant, si ses yeux avaient du mal à tenir ouverts, que ses gestes étaient moins assurés et que ses pensées étaient embrumées, c’était uniquement dû aux cochonneries qu’il avalait en trop grand nombre. Avant, il aurait passé sa nuit à traîner dans des coins glauques ou à l’intérieur d’un club huppé, il se serait réveillé auprès d’inconnus avec aucun souvenir des heures ayant précédé ou la première chose que ses yeux auraient vue en s’ouvrant aurait été le sol de sa chambre d’hôtel, un flacon de médocs vide renversé à côté de lui.

Désormais, il avait toute sa tête, ses mains ne tremblaient plus sous le manque - du moins, nettement moins souvent qu'à une certaine époque -, ses idées étaient claires et pourtant, certaines de ses nuits restaient mouvementées, éreintantes, harassantes ! Celle venant de s’écouler était de cet ordre.

Sa garde avait été perturbée par de nombreuses interventions, mais cela n’avait rien de très étonnant dans une ville comme New York ; les accidents étaient fréquents, les prémices d’un incendie tout autant, et parfois, il y avait ces appels qui les menaient, lui et ses coéquipiers, à voir des choses étonnantes, totalement déconcertantes, quand d’autres étaient loufoques, amusantes ou particulièrement désopilantes… Cela avait été le cas au début de son tour, lorsqu’il s’était retrouvé à devoir expliquer à une horde de jeunes femmes que non, le 9-1-1 n’était pas un numéro à composer pour égayer une soirée d’enterrement de vie de jeune fille mal organisée ! Le pompier aurait pu s’agacer et élever le ton, mais ce n’était pas dans sa nature que de s’énerver facilement et encore moins pour une plaisanterie de ce genre - qu'il aurait lui-même pu faire il n'y a pas si longtemps de cela -, alors il s’était montré ferme, gardant néanmoins un léger sourire amusé aux lèvres tout en leur conseillant d’y aller doucement sur la bouteille. Ses collègues s’étaient royalement moqués de lui tandis que la future mariée l’avait pris à partie en tirant sur son bras dans le but de le faire entrer dans l’appartement, lui faisant savoir qu’ils pouvaient tous rester, que c’était une question de sécurité et qu’ils ne regretteraient pas leur décision… Heureusement, on était venu le sortir de là et ses fesses s’étaient rapidement retrouvées installées dans le camion rouge et blanc en toute tranquillité. Pour sûr qu’il entendrait parler de cette histoire pendant des mois !

Par la suite, les choses s’étaient compliquées alors que, sur le chemin du retour pour la caserne, la radio s’était mise à grésiller pour leur indiquer une nouvelle adresse. En arrivant sur les lieux, ils avaient perdu leur bonne humeur et un silence pesant s’était abattu dans l’habitacle de métal. Une échauffourée entre deux groupes de petits délinquants avait dégénéré, et il y avait de nombreuses victimes dont certaines n’avaient absolument rien à voir dans les histoires louches des bas-fonds new-yorkais.

Oui, sa vie avait bien changé. L'insouciance et les médocs avaient laissé place aux obligations et à un travail prenant. Si parfois il avait l’impression que tout était trop compliqué à gérer pour lui, qu’il était à deux doigts de craquer, d’appeler son ancien dealer et de se laisser sombrer dans quelques heures d’euphorie enchanteresse, il se ressaisissait rapidement en balayant d’un mouvement de tête ses pensées. Il ne pouvait plus se permettre ce genre de dérapage. À présent, il avait trop à perdre.

Allongé sur son lit, vêtu d’un jogging faisant office de pyjama, il n’avait pas pris la peine de se glisser sous ses draps, son corps refusant de faire cet effort lui semblant surhumain sur le moment. Ses paupières s’étaient fermées avant même qu’il ne s’échoue sur le matelas, le sommeil le gagnant à une vitesse hallucinante. Heureusement, il n’avait pas oublié que le lendemain – ou quelques petites heures plus tard – il devait profiter d’une journée particulière. Une journée entière avec Théa. Le programme des réjouissances était confortablement installé dans sa tête, tandis que son réveil sonna pour lui annoncer que, enfin, les festivités allaient pouvoir commencer. Anticipant sa garde prolongée d’hier, il avait organisé tout le nécessaire en amont. Ainsi les serviettes de plage avaient déjà trouvé leur place dans un panier alors que la couverture utile à tout bon pique-nique leur tenait compagnie à côté de brassards et d’une bouée flamant rose pour sa fille.

Il avait sauté du lit comme si le peu d’heures de sommeil à son compteur n’avaient aucun impact sur lui afin de filer sous la douche dans l’espoir de gommer ses petits yeux. Lorsque la sonnette retentie, il venait tout juste de terminer de s’habiller. Le timing était parfait !

« J’arrive, j’arrive ! », chantant pour avertir ses invitées de son arrivée imminente, il eut la mauvaise idée de jeter un coup d’œil dans le miroir trônant dans le couloir avant d'ouvrir ; ses cernes grignotant ses pommettes, il ressemblait à un zombie. Tant pis, il égayerait le tout de son sourire habituel et ça passera comme une lettre à la poste !

« Attends… Laisse-moi te regarder. », il avait réceptionné la petite dans ses bras quand elle lui avait foncé dessus en guise de bonjour, et il l’éloigna après lui avoir donné un énorme bisou sur la joue. Les jambes de Théa pendaient dans le vide pendant que, du bout des bras, il la faisait doucement pivoter de gauche à droite pour l’observer en fronçant le nez, « Tu es vraiment la petite fille la plus magnifique que j’ai pu voir de toute ma vie. Et ces lunettes… On reconnaît bien là la patte de ta grand-mère. ». Il ne put s’empêcher de laisser un rire amusé sortir d’entre ses lèvres alors qu’il fit remettre les pieds à terre à la gamine.

« Bonjour Emma. Tu ne me sautes pas dessus, toi ?! », évidemment, il plaisante et cela s’entend parfaitement. Il s’approche de la jeune mère pour enlacer ses épaules. Cette vieille habitude lui colle à la peau, il la tient depuis qu’elle est venue lui rendre visite lors de sa cure de désintoxication, et depuis, il a un mal de chien à la saluer autrement. Il ne s’agit à chaque fois que d’une brève étreinte mais c’est plus fort que lui, cela lui donne l’impression qu’ils sont plus que deux adultes ayant partagé une simple nuit et de laquelle en a résultat un joli paquet surprise. De plus, il aime se dire que Théa les aperçoit ainsi, et qu’elle gardera pour toujours cette image de ses parents proches, heureux et capables d’avoir une relation cordiale malgré le fait qu’ils ne soient pas tout à fait une famille au sens strict du terme.

Mère et fille sont impatientes de savoir où il les emmène. Elles ne le montrent pas de la même manière ; Théa sautant presque sur place avec une énergie débordante tandis qu’Emma est plus mesurée, indiquant sa curiosité par des mots.

« Le mystère sera bientôt résolu ! », il attrapa le panier qui l’attendait tout près de la porte et duquel dépassait un indispensable pour la journée à venir. « J’ai prévu un parasol, ce sera utile pour la sieste de Théa, surtout si elle a peu dormi. », refermant la porte à clé derrière lui, il se retourna vers Emma en lui souriant, « Je l’accompagnerais sûrement pour faire un coucou à Morphée, j’espère que ça ne te dérangera pas. ».

Il tendit la main en direction de la petite tête blonde, « C’est parti ?! Vous êtes toutes les deux prêtes pour une super journée en famille ? ». Il osa le mot, soucieux de l’entendre sortir de sa bouche malgré tout. « Je suis content qu’on passe ce moment tous ensemble. Et je voulais te remercier pour t’être occupé du repas pour ce midi, je suis rentré tard, j’aurais eu du mal à le faire. », marchant tous les trois mains dans la mains dans le couloir de son immeuble, ils sortirent dans la rue, Liam les conduisant jusqu’à une voiture qu’il avait empruntée à un ami afin de faciliter le transport de tout leur attirail.

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Malgré le ton enjoué de Liam, je vois immédiatement son teint pale et ses cernes. Pour autant, je garde le sourire et prend soin de pas montrer mon inquiétude alors que Théa et lui sont tout à la joie de leurs retrouvailles. La fillette est en adoration avec ce papa, surtout qu’elle ne voit que pour les bons moments. Je plisse les lèvres pour étouffer quand Liam relève pour les lunettes de la petite. Maman a ses lubies et c’est souvent difficile de deviner qu’elle a réussi à élever une fille aussi discrète et sage tellement elle aime l’exubérance. Parfois j’aimerais bien être une petite souris pour voir comment cela se passe quand c’est elle qui gère. Elle m’a promis de faire des efforts pour que cela se passe bien, mais elle ne cesse de me mettre en garde contre « les hommes comme lui » et me rappeler « notre situation » a toute les deux.

Soucieuse de chasser ces pensées noires et toutes cette tension avec laquelle je dois composer de plus en plus à mesure que notre faussaire augmente le cout de son silence, je me concentre sur l’instant. C’est joyeusement, je réponds à sa plaisanterie, contente de partager ce moment de détente tous les trois :

« Je me retiens difficilement, j’ai peur que tu t’écroules si je me lance… »

Je ne fais que rosir légèrement, tout en lui rendant son accolade. A croire que j’ai réussi a m’habituer a cette façon de me saluer, qui est un peu trop agréable pour ne pas me troubler a chaque fois… depuis 3 ans. Une chance que personne ne s’en rende compte et que je ne sois pas obligée de tout dire a maman. J’essaye de me convaincre que ce n’est pas grave, ca ne changera rien a ce qui se passe ou au fait que je ne ressemble pas vraiment aux femmes qui sortent de chez lui et que je croise parfois. Il n’y a donc pas de sujet d’inquiétude.

Je suis plus réservée que Thea, l’habitude de vivre avec autant de secret sa cacher sous un masque, mais je trépigne presque autant qu’elle. La joie de Liam quand il m’a annoncé son projet était aussi contagieuse qu’intrigante. Maman a parié sur un parc d’attraction, moi sur une balade loin de la ville… Bon, vu qu’il parle de faire une sieste et de parasol, ce n’est donc pas un parc d’attraction.

« J’ai pris de quoi potasser un peu des cas médicaux, ca m’occupera pendant que les enfants dorment. »

Je ne cache pas mon plaisir de cette escapade et accompagne Thea dans son cri de joie quand il nous demande si on est prête a vivre une journée en famille. C’est étrange d’entendre ce mot dans sa bouche, mais il est pourtant juste. Il n’y a qu’a voir notre fille qui attrape la main de son père avec un bonheur évident pour réaliser la justesse de cette phrase. Même si ce n’est pas au sens classique du terme, c’est ce que nous sommes au final : une famille et je crois que ca me plait beaucoup autant que cela me fait un peu peur. Si les choses tournent mal avec mon géniteur… est ce que je ne le mets pas en danger lui aussi ? Je me ressaisie vite et chasse l’ombre de mon passé qui n’a pas sa place aujourd’hui.

« Ce n’est rien ! Et puis, c’est moi qui te remercie pour ton idée alors que tu as l’air épuisé.
- En plus maman elle adore cuisiner et je l’ai aidée !! C’est moi qui ai mis le fromage dans ton sandwich !! j’en ai mangé un bout pour être sûre que ça soit bon tu sais, et pis le jambon aussi… »

Je les suis avec de plus en plus de questions sur notre destination, surtout que je le vois nous amener a une voiture. Thea est surexcitée. Elle a bien pris le taxi une fois avec ma mère, mais ca remonte a si loin qu’elle ne doit pas s’en souvenir. Pour nous, les transports se résument au métro et au bus. C’est possible que, moi aussi, je sois un peu impressionnée de ne pas avoir a prendre les transport en commun. En bonne maman, je ne peux pas m’empêcher de lui demander :

« Je ne savais que nous allions en voiture… tu as un siège auto pour Thea ? Sinon je peux appeler une voisine pour voir si elle peut nous dépanner. »

Vamos a la playa

Emma Lockwood et Liam Keller

“La famille c'est une richesse incroyable, ça donne des outils pour pouvoir affronter les moments extraordinaires, les moments plus difficiles, les hauts, les bas.” - Céline Dion

Ces moments à trois étaient toujours la source d’émotions fortes. Liam attendait systématiquement avec une impatience démesurée de pouvoir voir sa fille, et quand Emma se joignait à eux, il ressentait une pointe d’inquiétude. C’était plus fort que lui, le fait de ne pas pouvoir passer un peu de temps seul avec Théa le turlupinait. C’était comme si, à chaque fois, on s’amusait à lui rappeler ses erreurs passées, ses cafouillages présents et son immaturité constante. Pourtant, il savait que dès qu’il était avec elle, il faisait les choses bien. Avec la petite, il ne ressentait jamais l’envie de retomber dans ses travers, et ce, même lorsque la situation se compliquait. Il parvenait à gérer les crises dues à l’enfance sans avoir l’impression d’être dépassé, il n’angoissait pas, il n’avait pas l’impression de tout faire de traviole. Mais rien ne semblait suffisant, on ne lui faisait toujours pas confiance… Évidemment, il était apte à comprendre les réticences de chacun à son égard, mais il commençait à trouver le temps un peu long.

Sans doute était-ce pour cela qu’il avait initié cette sortie en famille, c’était là un bon moyen de prouver à Emma qu’elle pouvait lui confier la prunelle de ses yeux sans crainte ! Et puis… Soyons honnête, même s’il appréhendait toujours les mauvais jugements pouvant résulter de leurs rencontres à trois, il était également toujours ravi de partager un peu de temps avec la mère de sa fille. Surtout que, malgré les règles qu’elle lui imposait quant à ses visites parentales, la brune lui montrait que très rarement ses doutes et ses craintes le concernant. Cette dualité était d’ailleurs assez déconcertante. Quand ils étaient ensemble, tout semblait rouler comme sur des roulettes, mais rien n’y faisait, il devait encore se coltiner un accompagnateur dès lors qu’il était avec Théa.

« Ces muscles que tu peux voir là ne sont pas présents que pour la déco tu sais ?! », bombant légèrement le torse après avoir reposé sa fille au sol, il mimait à la perfection le mec sûr de lui et arrogant qu’il n’était pas réellement. Les boutades étaient monnaie courante avec Liam, il adorait tout tourner à la dérision et il était même prêt à se moquer de lui-même s’il le fallait pour le bien d’une bonne blague !

Il salua comme il se doit la jeune femme en la serrant quelques secondes dans ses bras tout en lui souriant de toutes ses dents face à l’impatience de chacune des deux filles. Constater que sa surprise les faisait trépigner le rendait particulièrement heureux, et il avait hâte de voir leurs têtes quand ils arriveraient sur place.

« Belle, intelligente et compréhensive… Tu es vraiment la femme parfaite ! », ne se rendant pas franchement compte du sens profond de ses paroles, il avait attrapé le panier préparé afin de s’élancer dans l’aventure qui les attendait avec enthousiasme.

Tenant la main de sa fille tandis que la seconde était occupée par celle d’Emma, ils marchaient ainsi dans les couloirs de son immeuble jusqu’à sortir sur le trottoir. Liam avait tout prévu et il remercia la jeune femme pour son aide dans les préparatifs.

Son visage avait pivoté afin de la rassurer sur sa fatigue qu’elle avait, évidemment, remarqué, mais Théa lui coupa l’herbe sous le pied pour lui expliquer sa participation à leur repas du midi.

« Mais... », il se pencha en direction de la gamine pour lui chatouiller le ventre, « Tu es un véritable petit ogre ! J’ai hâte de goûter à ce sandwich, si c’est toi qui l’a préparé, il sera forcément délicieux. ». Un bisou sur le haut du crâne blond et il appuya sur le bouton pour déverrouiller les portes de la voiture empruntée à un ami.

« Un siège auto ? C’est obligatoire tu crois ? Je pensais qu’en entortillonnant plusieurs fois le petit monstre dans la ceinture de sécurité ce serait suffisant. », son ton était sérieux, tout comme l’air qu’affichait son visage. « Franchement Emma… détend-toi. Tout va bien se passer. », désormais il la regardait en souriant comme s’il se moquait d’elle et que lui était totalement désinvolte. Il patienta quelques secondes en se retenant d’exploser de rire, puis il ouvrit la porte arrière du véhicule, « Tadaaaam ! ». Sur le siège trônait un magnifique siège auto, « Mon ami a des enfants et vu qu’il était à peu près sûr que ni toi, ni moi n’avions de quoi faire voyager Théa en toute sécurité, il m’a proposé de me le laisser. Par contre, j’espère que tu sais comment ça fonctionne... ». Son rire avait enfin éclaté, car il devait bien avouer que cet objet lui était totalement inconnu.

Liam avait récupéré le sac d’Emma en plus du sien afin de les mettre dans le coffre, et une fois derrière le volant, il se régla le rétroviseur intérieur pour regarder la petite puis sa mère en souriant joyeusement, « Tout le monde est attaché ? Alors en route mauvaise troupe ! ».

Lorsqu’il inséra la clé pour mettre le contact, une musique ultra forte sortie des baffles et c’est tout en riant qu’il baissa le volume, « Désolé, j’avais besoin de me tenir éveillé en rentrant du boulot. Je te laisse choisir la station de radio ?! Il nous faudrait quelque chose d’enjoué, d’ensoleillé et de particulièrement enjoué pour s’accorder avec cette journée. ». Sa petite moue contrite avait laissé place à son éternelle risette alors qu’il enclenchait le clignotant pour sortir de sa place et s’engouffrer dans le trafic new-yorkais. Il avait profité de cette bourde pour rassurer Emma quant à ses cernes. Non, il n'avait pas passé la nuit à planer après avoir été trouvé un ancien dealer. Elle ne lui avait rien demandé, mais il préférait anticiper la question.

Le trajet fut étrangement rapide, la ville étant encore plongée dans les congés d’été, le flot de voiture se faisait moins dense. Arrivé aux alentours de Kensington, Liam avait fait un premier arrêt pour dire malicieusement, « Maintenant, il va falloir vous bander les yeux… ». Il voulait tenir la surprise jusqu’au bout !

Sortant du véhicule, il l’avait contourné pour s’occuper des yeux de Théa en premier, « Tu verras, quand on sera arrivés à destination, tu vas être folle de joie. ». Il avait craint que cette partie de la journée n’inquiète la petite, mais elle obtempéra sans faire de difficulté en posant néanmoins des dizaines de questions.

« A ton tour, tu te prêtes au jeu, d’accord ? », il avait ouvert la portière passager pour s’adresser à Emma. Un bandana dans une main, il lui fit signe de l’autre de se tourner pour qu’il puisse le nouer à l’arrière de son crâne.

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Avec espièglerie, je ne peux pas m’empêcher de le taquiner alors qu’il bombe le torse :

« Des muscles ? Ou ca ? Sous le rembourrage ? »

Évidemment, qu’on peut difficilement les louper, mais je l’avais connu squelettique, dévoré autant par le traitement que la maladie. Aussi Liam était loin de se résumer à sa carrure pour moi. Par contre, son humour, sa joie de vivre, son naturel… C’est plus comme cela que je le définissais et qui m’avait surement fait dire oui pour venir a sa soirée.

« Mais si maman !! Papa c’est le plus fort du monde !! »

Je rassure la fillette qui prend avec un peu trop de sérieux la défense de son père, en lui déposant un baiser sur le front pour lui expliquer :

« C’est possible, mais il ne faut pas trop lui dire, sinon il ne passera plus les portes… et on ne pourra plus faire de sortie en famille. »

Je lui attrape la main pendant qu’elle observe Liam comme si elle craignait vraiment de le voir gonfler de partout. Si j’ai un léger frisson a la remarque du pompier, en sentant le rose arriver sur mon visage, je me reprends vite en me souvenant que c’est juste une moquerie. Je ne manque pas de lui renvoyer joyeusement la balle en lui disant :

« Je note qu'au final, pour toi la femme parfaite, c'est surtout celle qui te laisse faire la sieste. Je t’aurais pensée avec des critères plus élevés. »

Je regarde avec beaucoup de tendresse l’échange qui suit entre Thea et son père. Ma mère pense que j’ai fait une bêtise en le faisant venir dans nos vies, que ça va tout compliquer en cas de drame, mais j’ai juste a les voir heureux d’être l’un avec l’autres pour savoir que j’ai eu raison. Je fronce les sourcils quand le sujet du siège auto est abordé avant de comprendre qu’il est encore en train de se moquer de moi. Je me sens légèrement idiote, mais impossible de ne pas m’angoisser pour un rien dès que ca touche Thea. Je lui fais une petite grimace contrite quand il me demande de me détendre :

« Désolée, j’ai un peu de mal avec ce mot mais je tiens a souligner que je fais des efforts. »

Je suis rassurée qu’il ait pensé a tout, mais je suis obligée de prendre le temps de lire les instructions sur le côté du siège, alors que Thea a déjà grimpée dedans, pas vraiment sure de moi.

« Ca va etre la 3e ou 4e fois de ma vie que je monte dans une voiture, tu sais ? Mais bon, si j’ai réussi a avoir mon diplôme, je devrais quand même pouvoir comprendre les instructions. »

Je suis quand même obligée de m’y reprendre à 2 fois avant d’être sure que c’est bien mis et d’aller m’installer devant, côté passager. Thea est aussi excitée que si elle était dans un manège. On sursaute toutes les deux quand l’autoradio se déclenche. Je ris doucement à son explication, sans me rendre compte qu’il puisse penser que je le suspecte en rechute. C’est donc le cœur léger que je lui réponds :

« Assume plutôt que tu deviens sourd, on est entre nous, on ne te jugera pas, promis. »

Je triture le bouton avant d’arriver sur de la musique Latina. Ca me parait pas mal. Je ne sais pas si j’assume que Thea tente de chanter du Shakira. Avec un air faussement innocent je me sens obligée de dire a Liam :

« Ca vient forcement de ma mère, rien a voir avec ce que j’écoute quand je fais le ménage… »

Thea commente tout ce qu’elle voit entre deux refrains et adore cette balade en voiture. Impossible de ne pas chanter elle ni rire de sa façon de refaire les paroles des chansons en espagnole. C’est agréable de se déplacer comme ça plus qu’en bus. Fut un temps où je pensais passer mon permis au moins pour en louer une de temps en temps. L’arrivée de Thea avait déjà bien fait fondre les économies destinées a ce projet, le retour du faussaire avait terminé de les assécher. Je suis un intriguée quand Liam s’arrête et regarde autour de nous, cherchant un parc ou une forêt avant qu’il ne s’explique sur la suite de son programme. Thea trépigne encore plus et je crois que j’ai très envie de jouer le jeu. De façon très puérile, je crois que j’adore les surprises et que cela fait des années que je n’en ai pas eu des comme ça.

« Tu sais bien que je n'arrive jamais à dire non… »

Je me tourne et le laisse faire, avec une drôle de sensation de chair de poule juste parce qu’il m’effleure les cheveux dans son geste. J’espère que cette manie d’être à fleur de peau dès qu’il me touche finira par passer. C’est donc à « l’aveugle » que nous finissons la route, quand la voiture s’arrête enfin, je n’ai pas le temps de demander a Liam si je peux retirer le bandeau que j’entends Thea crier de joie !

« OH !! J’AI JAMAIS VU UN AUSSI GRAND BAC A SABLES !! IL EST IMMENSE !! REGARDE MAMAN !! C’EST LE PLUS GRAND DU MONDE !!!»

Je soulève le miens avant de me figer, plus pale qu’une morte. Ce n’est pas un bac a sable, c’est une plage, mais ce n’est pas ça le problème, c’est plus la mer derrière avec les énormes vagues que je distingue. Je ne me rends pas compte que je suis en train de me cramponnée au bandeau, les doigts crispés dessus alors que mes yeux ne peuvent pas se détacher de ce qui me semble être la pire menace du monde.

« C’EST QUOI LE LAC DERRIÈRE ?!! Papa !! On n’a pas pris de pains pour les canards !! »

J’ai du mal a avaler ma salive et suis incapable de parler. J’essaye de me rassurer, on n’a pas de maillots de bain, on va rester sur le sable, ca va aller… voila… ca va aller…

« Ils ont perdus leurs couleurs les canards ici ? Sont tout blancs et gris ? Ils sont malades ?»

Vamos a la playa

Emma Lockwood et Liam Keller

“La famille c'est une richesse incroyable, ça donne des outils pour pouvoir affronter les moments extraordinaires, les moments plus difficiles, les hauts, les bas.” - Céline Dion

Il avait pris un air faussement outré, « Du rembouquoi ? Théa, tu entends ça ? Maman ose dire que papa n’est pas costaud ! ». Son sourire énorme trahissait totalement le sens de ses paroles et il explosa de rire quand la petite prit sa défense avec un en train qui rendrait heureux n’importe quel père, « En voilà une demoiselle qui sait ce qu’elle dit. Tu devrais écouter les sages paroles de ta fille. ». Sa mimique satisfaite était plus que parlante jusqu’à ce que la brune réplique et que le regard inquiet de Théa se pose sur lui. Un petit rire s’échappa une nouvelle fois de ses lèvres tandis qu’il s’agenouillait pour être à sa hauteur, prenant ses petites mains dans les siennes pour les lui faire poser sur sa tête, « Ne t’en fais pas, regarde, grâce à maman, elle ne peut pas trop enfler. ».

Il adorait ces moments de complicité, et quand ils s’y mettaient tous les trois, c’était d’autant plus agréable. Cette journée s’annonçait merveilleusement bien !

Liam ne se rend pas compte que son compliment semble poussif, et que la brune puisse l’interpréter comme une plaisanterie. C’est un peu le souci ça… À force de faire le pitre, on finit par ne plus prendre au sérieux ce que vous dites. Mais sur ce coup-là, il pensait véritablement ce qu’il avait dit. Emma était fantastique, il en avait conscience depuis bien longtemps maintenant.

« Sache que la femme parfaite à de nombreuses qualités. Dont celle de me laisser faire la sieste effectivement. Mais pas que ! Elle me prépare également de superbes sandwichs et m’évite de choper la grosse en tête en me remettant les pieds sur terre. Si tu la croises, tu peux lui filer mon numéro, ce serait sympa de ta part. », il réitérait son compliment en s’exprimant de manière différente et détournée, puis il s’amusa à chatouiller Théa qui venait de lui avouer avoir grignoté un morceau de son repas du midi. Si on le privait de l’intégralité de son sandwich, il risquait de mourir de faim ! Mode drama queen activé…

Arrivant près de la voiture empruntée, il laissa Emma se charger d’installer la petite dans son siège auto pendant que lui rangeait les affaires dans le coffre. Quand tout le monde fut prêt, et que le moteur se mit à vrombir, l’ensemble des passagers sursautèrent. Le moment était parfait pour justifier ses cernes en expliquant les raisons de la musique criarde venue abîmer leurs tympans.

« C’est vrai que je me fais un peu vieux... », tournant son visage en direction d’Emma, il lui lança un sourire avant de lui dire de s’occuper de trouver du son sympa pour le trajet. À présent, c’est au tour de la jeune femme de développer son choix, comme si l’un et l’autre se sentaient dans l’obligation de légitimer chacune de ses décisions. Cependant, Liam faisait rarement dans le jugement, que ce soit avec ses proches ou avec des inconnus, il préférait faire preuve de bienveillance et de compréhension. D’autant que là, l’explication de l’infirmière ne put que lui tirer un sourire amusé et taquin, « Je payerai cher pour te voir te dandiner sur cette chanson avec ton balai à la main ! ».

Sur le chemin, ils chantent tous les trois en chœur sur les paroles en espagnol, Liam riant en entendant le yaourt fait par Théa. Ces sonorités lui rappellent son voyage en Amérique du Sud, ses souvenirs de ce passé mêlant flou artistique et image parfaitement nettes en fonction de la quantité de médicaments ingurgités lors de son périple. Se remémorer cette période de sa vie le rend parfois nostalgique, bien qu’il en pense rarement du bien, mais il est surtout heureux de pouvoir avoir de véritables souvenirs du moment présent. Jamais il ne pourra oublier cette journée, il en est convaincu, et les images gravées dans sa mémoire resteront précises. C’était une belle victoire !

Arrêtant le véhicule sur une rue bordée d’immeubles, il annonce son plan pour la suite. Il tient absolument à ce que la surprise soit totale, alors il a prévu de faire terminer le parcours à ses invités en les privant de la vue.

Théa est enthousiaste, comme à son habitude. La réaction d’Emma l’inquiète davantage, il craint qu’elle refuse sa demande alors qu’il ouvre la portière passager en lui désignant un bandana. Elle accepte immédiatement, ce qui ne fait qu’agrandir le sourire de Liam qui lui bande délicatement les yeux, « Merci. ». Il glisse ce simple mot à son oreille, ses paumes reposant sur les épaules de la demoiselle, avant de refermer la porte, se disant que, évidemment, elle lui dit non régulièrement. Non, pour qu’il passe du temps seul avec Théa. Non, pour que la petite puisse dormir chez lui. Non, non et toujours non. Pourtant, aujourd’hui, elle lui fait une confiance aveugle pour les guider toutes les deux, alors il voit là une chance à saisir.

Durant le trajet restant, Théa pose mille et une questions, son père répondant évasivement pour ne pas gâcher la surprise. Lorsqu’ils arrivent à destination, c’est avec une chance énorme qu’ils trouvent une place de parking à la lisière de la plage.

« On est arrivés. », il n’a pas le temps de leur dire de ne pas regarder qu’il entend déjà la petite voix de Théa s’exclamer de joie. Tant pis pour la surprise ! Il avait imaginé les choses différemment. Dans sa tête, il allait leur tenir la main jusqu’à ce qu’elles puissent sentir les grains de sable chatouiller leurs orteils, et alors il leur aurait redonné la vue.

« Ça te plaît ma chérie ? », l’excitation de Théa gomma rapidement le fait de ne pas avoir pu mener son idée à bien. Elle était heureuse, alors lui aussi. La voir si enthousiaste et euphorique lui flanqua un sourire jusqu’aux oreilles. Mission réussie !

Il regarde Emma pour voir également sa réaction, mais il n’obtient pas vraiment celle escomptée, « Je me doute que pour toi ce n’est pas grand-chose... ». Comment pourrait-il s’imaginer qu’elle ne met jamais un pied à la plage parce qu’elle a peur de l’eau ? Ils en avaient parlé tant de fois depuis qu’ils se connaissaient, et jamais elle n’avait mentionné cette phobie, « Ce n’est qu’une plage, mais je tenais vraiment à assister à une première fois de Théa. Et celle-là, tu sais, avec ma passion pour le surf, c’est important pour moi. ». Pendant qu’il parlait, il s’était penché sur la banquette arrière pour détacher l’enfant qui se précipita vers la fenêtre, collant son visage et ses petites mains à la vitre en posant encore et toujours des questions, « Ça, c’est l’océan. Tu verras, c’est fantastique. Il y a des vagues, des coquillages, des algues. On va découvrir tout ça ensemble ! ».

Liam avait tout loupé des premières années de sa fille, il n’avait donc pas assisté à ses premiers pas, ni à ses premiers mots, il était passé à côté de sa première rentrée des classes ou de ses premiers gribouillages. Alors cette découverte-là, il ne voulait pas qu’elle la fasse sans lui.

Emma était restée silencieuse, et Liam commençait à se dire qu’il avait fait un truc de traviole. Sans comprendre le pourquoi de ce mutisme, il continuait à répondre aux questions de Théa en souriant, simplement heureux de partager ce moment avec elle. De partager ce moment avec elles deux, même si l’une semblait être totalement ailleurs.

« Ce sont des mouettes. Ces oiseaux ressemblent beaucoup aux canards, mais au lieu de vivre sur les lacs ou sur les rivières, ils vivent ici, sur les mers ou sur les océans. », il était sorti de la voiture, ouvrant la portière arrière pour accueillir Théa dans ses bras. Jetant un coup d’œil en direction du fauteuil passager, il récupéra les affaires dans le coffre avant de déposer le tout – sa fille comprit – sur un banc tout près de la voiture, sur l’esplanade longeant la plage en vissant correctement le chapeau de paille de la petite sur sa tête, « Tu nous attends là deux petites minutes. Tu ne bouges pas hein ? On est à deux pas, il faut juste que ta maman et moi on ait une petite conversation. Après, on va s’amuser dans le sable, faire des constructions et faire un plouf ensemble, d’accord ? On arrive tout de suite. ».

Pas très serein à l’idée de la laisser seule, il avait choisi un emplacement où il pouvait la surveiller depuis la voiture.

« Emma ? », après avoir contourné le véhicule, il ouvrit la porte comme il l’avait fait pour bander les yeux de la jeune femme. Sa voix était calme, douce et posée. Il voyait bien qu’il y avait un souci, mais il ne parvenait pas à mettre le doigt sur ce que cela pouvait être. En parlant de doigt… Il remarqua que ceux de la brune étaient crispés sur le tissu qu’il avait utilisé un peu plus tôt. Déposant délicatement sa main sur les phalanges d’Emma comme si elle était un petit chiot apeuré, il déposa la seconde sur le genou de la demoiselle, « Emma, je m’inquiète. Dis quelque chose, s’il te plaît. Je… J’ai fait une connerie ? ». Sa paume se crispait légèrement sur la peau de la mère de sa fille, celle-ci semblant totalement focalisée sur l’océan. Il lui fit tourner le visage pour qu’elle se concentre sur lui, « Explique-moi. Tu as l’air tétanisé, il y a un problème avec cette plage ? On peut aller à une autre si tu préfères. ».

Naïvement, il imaginait qu’un mauvais souvenir venait la perturber, mais il ne pouvait pas penser que, qu’importe la plage, qu’importe l’océan, sa peur était plus ancrée qu’un simple lieu.

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« Parce que tu serais le genre d’homme a t’intéresser a une femme parfaite ? Et tu as oublié de préciser qu’elle doit rigoler a tes blagues. »

Je lui fais un petit clin d’œil, grisée par cette complicité entre nous et notre façon de nous taquiner comme deux ados. Je pense, aussi, que cela m’avait horriblement manqué pendant toutes ses années sans nouvelle. Retrouver cette complicité qui avait fait que j’étais toujours plus qu’impatiente de venir le voir à l’hôpital me fait un peu trop sourire, surtout au gout de ma mère.

Dans la voiture, l’ambiance reste au beau fixe et Thea semble rayonnante de ce moment tous les trois. Liam aussi a l’air sincèrement heureux, une autre raison pour que je me sente aussi bien. Le voir comme ça me laisse a penser que les bas et les rechutes sont peut-être évitables. Mon optimisme fait que je veux y croire de tout mon cœur. De toute façon, pour le moment, je n’arrête pas de rire en réalisant que Liam aussi aime donner de la voix sur des chansons improbables. L’espace d’une seconde je nous imagine vraiment vivre tous les trois ensembles et tous les problèmes de voisinage liés a cela. Mon vrai pécher mignon est reste toutes les chansons de Dirty Dancing que Thea connait mieux que des comptines pour enfant.

« Est-ce une façon de me proposer de venir faire le ménage chez toi ? »

Le moment est incroyablement agréable. Liam n’a aucune idée de la vie tristement sage que je mène où ce genre de gros plaisir est aussi rare qu’une averse dans un désert. J’ai honteusement l’impression d’avoir 10 ans à trépigner pour cette surprise au point d’oublier que je ne suis que l’invitée obligée pour qu’il puisse voir Théa. Je me prends un peu trop au jeu en imaginant que tout ça a été pensé, aussi, un peu pour moi, il faut dire, pour ma défense, que le bonheur a tendance a me tourner beaucoup trop la tête.

Prise dans ce frisson incontrôlable de sentir les doigts de Liam m’effleurer quand il me bande les yeux avant de poser ses mains sur mes épaules, je suis loin de deviner ce qu’il ressasse. Je suis peut-être égoïste, ou aveugle, de ne pas soupçonner tout ce qu’il endure à cause de moi. La voiture se met en branle, a nouveau, et c’est très perturbant de se sentir avancer sans rien voir, heureusement, cela ne dure pas longtemps.

Là où Thea est partie dans des cris de joie et des questions à n’en plus finir en découvrant « la surprise », je reste muette, pétrifiée de voir les eaux menaçantes dans lesquelles des gens commettent la folie de se baigner. En fait, je n’entends plus rien, je ne vois plus rien, sauf cette masse aqueuse pleine de promesses de souffrances. Quelques images, éparses, me reviennent sans que je n’arrive à leur donner assez de matière pour les comprendre. C’est juste des sensations : de la douleur, de la peur, des suppliques. L’eau est synonyme de trop de choses qui échappe a ma compréhension, seul mon instinct me parle au nom de mon inconscient. Pale, perdue dans les brumes sordides d’un passé qui m’échappe, je ne me rends même pas compte que j’ai du mal a respirer ou que Liam me parle. C’est seulement quand il me touche, que je réagis brusquement, sursautant comme un chat terrifié avant de réussir à poser mes yeux dans les siens et me souvenir du moment présent. Je ne réalise que trop son regard inquiet tout en comprenant ses mots et je m’en veux terriblement. Je fais un effort incroyable pour me reprendre, avec le réflexe de me forcer à sourire est là, même s’il est maigre sur mon visage livide. Je ne veux pas gâcher tout ce qu’il essaye de faire. Je me sens tellement pitoyable alors qu’il s’est donné du mal et semblait si heureux de partager ca avec nous.

« Non non… excuse moi Liam… je… juste un peu de fatigue et surement, le bandeau avec la voiture… Mauvais mélange. »

J’ai ce reflexe de mentir parce que je ne sais faire que ça quand je me sens acculée ou que je veux protéger les gens. Avouer que j’ai peur de l’eau maintenant, ca serait piétiné tous les rires et sourires que j’ai vus depuis que nous sommes partis. Je me refuse a cela. Je me cramponne a sa main pour sortir de la voiture, les jambes flageolantes. Je pense que si je devais avancer dans un précipice sans être sûre d’avoir un élastique, je serais tout aussi fébriles. Néanmoins je me fais violence et me force a donner le change.

« Merci encore de tous ce que tu fais pour nous. Par contre, je n’ai pas prévu de maillot de bain pour Thea… »

Ni pour moi et pour cause, nous n’en avons pas. Je sais que la mer et le surf ont été la planche de salut de Liam dans ses pires moments, je me suis surprise d’aimer l’écouter en parler et même rêver de partager cela avec lui… mais ca n’a jamais été plus loin. Il y a un tel monde entre imaginer la mer et la voir en vrai. Elle fait beaucoup plus féroce que sur les photos.

Vamos a la playa

Emma Lockwood et Liam Keller

“La famille c'est une richesse incroyable, ça donne des outils pour pouvoir affronter les moments extraordinaires, les moments plus difficiles, les hauts, les bas.” - Céline Dion

« Elle le fait déjà. », son regard s’était déposé sur Emma, une risette à la fois amusée et légèrement arrogante collée aux lèvres. C’était vrai, la perfection qu’il venait de décrire ressemblait trait pour trait à la jeune femme qu’il observait. Et cette dernière riait également régulièrement à ses blagues ! Il ne faisait que dire ce qu’il pensait. Emma était de ces personnes que Liam trouvait formidables. Dès que l’occasion se présentait, il le lui disait, mais elle semblait systématiquement penser qu’il plaisantait. Or, il était parfaitement sérieux. Certes, il parlait toujours avec une petite dose d’humour et un sourire énorme, mais ses paroles n’en devenaient pas pour autant des bêtises énoncées pour faire une bonne blague. Pas à chaque fois en tout cas. Pas sur l’instant.

L’ambiance dans la voiture était fantastique. Les trois voyageurs riant, chantant en chœur, ils ressemblaient à une véritable petite famille. C’était particulièrement agréable et ce moment était loin d’être terminé.

« Tu m’as démasqué. », son rire venait de fendre l’air tandis qu’elle soulevait une option à laquelle il n’avait pas pensé, mais autant prétendre le contraire ! « Avec Théa on se chargera de mettre le désordre et de rentrer avec les chaussures sales. On choisira une chanson parfaite pour accompagner ta mission ! Qu’est-ce que tu en penses mon cœur ? », il avait regardé dans son rétroviseur intérieur pour sourire à la petite qui surenchérissait déjà, enthousiaste à l’idée de partager un nouveau moment tous les trois. Lui, il se marrait de cet apparent machisme qui ne lui ressemblait absolument pas. Emma lui avait tendu la perche, il n’avait que pu la saisir !

Jusqu’à présent, tout s’était déroulé à merveille. La surprise avançait calmement mais sûrement, tout comme la voiture avalait les kilomètres sereinement. Les deux femmes de l’expédition acceptèrent de se prêter au jeu sans que Liam n’ait à avancer le moindre argument. Théa frôlait l’euphorie à chaque proposition qu’il faisait, et Emma lui faisait confiance pour se laisser entièrement guider. Cette constatation lui faisait avoir foi en l’avenir. Si cette sortie continuait sur sa lancée, alors peut-être que le futur serait plus simple. Peut-être qu’elle lâcherait un peu la bride, qu’elle lui laisserait plus de liberté quant à ses instants de partage avec Théa. Il se mettait à imaginer père et fille pouvant passer plus de quelques heures ensemble, sans qu’une tierce personne soit présente. Liam n’avait pas préparé cette journée avec le but d’amadouer la mère de la petite, non, absolument pas, mais si cela permettait de lui montrer qu’il était suffisamment mature et prêt à tenir son rôle de père, alors c’était du gagnant-gagnant.

Ces belles images d’un avenir plus serein s’envolèrent rapidement. Il lui avait suffi de voir le visage déconfit d’Emma en découvrant la finalité de sa surprise pour penser qu’il venait de tout ficher par terre. Qu’avait-il fait de travers ? Ce n’était qu’une plage. Une plage et une envie débordante de pouvoir assister à une première expérience de Théa.

La brune ne semblait pas l’écouter alors qu’il se justifiait, se sentant presque obligé d’expliquer son choix et son besoin de voir sa fille s’épanouir dans un lieu qui lui tenait à cœur. Il voulait partager avec la petite tête blonde sa passion pour l’océan, il espérait qu’elle soit aussi heureuse que lui en courant dans les vagues et en profitant de l’air marin. Pour lui, c’était important. Mais il ne reçut qu’un silence glacial avant de se concentrer sur l’énergie débordante de Théa. Après tout, s’ils étaient là, c’était pour elle. Pas que… Liam avait voulu que cette journée soit spéciale pour eux trois, et une nouvelle fois, il avait l’impression d’avoir chié dans la colle en beauté.

Après s’être occupé de la petite, il était revenu auprès de la mère de cette dernière pour tenter de comprendre ce qui était en train de se passer. En ouvrant la portière du côté passager, il s’attendait presque à se faire enguirlander comme s’il avait commis une boulette énorme – sans savoir de quoi il s’agissait – mais ce fut tout l’inverse. Il se retrouva en face d’une Emma désespérément muette et focalisée sur l’horizon. En fait, la jeune femme semblait plus apeurée qu’en colère… Cette déduction faite, Liam commençait réellement à s’inquiéter, et ce ne fut qu’au moment où il déposa sa main sur les doigts crispés d’Emma qu’elle se mit à réagir.

Elle avait sursauté, le surprenant à son tour, avant de plonger ses yeux dans les siens en souriant. La mimique qu’elle lui servait ne le dupait pas. C’est qu’à présent, il la connaissait assez bien ! Mais il n’était pas du genre à voir le mal partout, alors quand elle lui assura que ce n’était que de la fatigue, il la crut sur parole.

« Un haut-le-cœur… Ça se comprend. Cette idée de bandeau n’était pas la meilleure. Désolé. », il se sentait bien crétin de ne pas avoir pensé que d’être bringuebalé en voiture avec les yeux bandés pouvait provoquer un mal-être ! Bon sang, il était pompier pourtant, il aurait dû anticiper ça ! « Il te faut un truc à manger, ça fera passer la nausée. ».

L’aidant à sortir de la voiture, il la laissa s’agripper à lui. Il avait refermé la porte derrière eux avant de passer son bras autour de la taille d’Emma pour la soutenir jusqu’à ce qu’ils arrivent près de Théa, « Je suis sûr que vous avez pris de quoi grignoter. Théa, ma chérie, tu peux chercher dans le sac quelque chose pour maman ? » .

À son tour, il farfouilla dans le panier qu’il avait préparé pour en sortir de la crème solaire, « Maintenant il va falloir se badigeonner. On ne plaisante pas avec les UV, ok ?! ». Un peu de prévention pour la petite ne faisait pas de mal, plus tôt elle se mettait cette règle d’or en tête, mieux c’était. « Tu ne vas pas y échapper, approche. », prenant place sur le banc à côté d’Emma, il lui faisait signe de son index, mais ce fut lui qui glissa vers elle pour déposer malicieusement un peu de crème sur le bout de son nez, « Ça va un peu mieux ? ». Elle ne semblait pas encore dans son assiette, alors, évidemment, il s’inquiétait, espérant qu’elle ne couvait pas quelque chose de plus inquiétant qu’un simple vertige lié à son idiotie.

Ses doigts étalaient correctement la protection sur le visage de la brune, ses pouces passant sur ses pommettes consciencieusement alors qu’il pouvait sentir son cœur battre un peu plus fort dans sa poitrine sous l’effet que ce rapprochement opérait sur lui. Comme à son habitude, Liam souriant, mais ses yeux se faisaient plus fuyants qu’à l’accoutumer, « Je te tartinerais le dos tout à l’heure, quand tu feras bronzette. Il est hors de question qu’une de vous rentre de cette journée avec un coup de soleil ! ». Sans s’en rendre compte, il prenait son temps pour appliquer la crème, profitant simplement de cette promiscuité fort peu courante entre eux, oubliant presque qu’ils n’étaient pas seuls… Ce fut le remerciement d’Emma qui le sortit de sa contemplation un peu trop longue, et la remarque suivante le fit sourire tandis qu’il s’éloignait enfin.

« Tu n’avais qu’à t’occuper du repas. Aujourd’hui, c’est moi qui gère ! Et ne t’en fais pas, j’ai tout ce qu’il faut. Pour vous deux évidemment ! », il s’était relevé en observant, attendri, leur fille qui tenait fermement la rambarde en regardant la plage, les mouettes, les vagues et tout ce qui était à portée de sa vue. « Si tu te sens mieux, il est temps d’aller se trouver un coin de sable tranquille où monter notre campement. », il lui tendait la main tout en souriant à pleine dent, prêt à la soutenir si la tête lui tournait encore.

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Les scènes décrites pendant le trajet, celle d’une vie de famille a trois, qui me séduisent tant, ne font pas long feu fasse a a panique. Cette sensation de danger, d’étouffer a avoir les poumons en feu, que personne ne viendra m’aider et que tout est finie alors que je veux tellement vivre… c’est un tourbillon presque chaotique qui m’entraine dans des images incohérentes de ce passé dont mon cerveau me protège. Ma seule certitude, presque animal, c’est que l’eau est une menace. Autant dire que, perdue dans les méandres de sensations aussi dévastatrices et de flashs cauchemardesques, c’est de tellement loin que la voix de Liam me parvient. Sa main qui m’effleure me sort de cet enfer et, en même temps, prouve à quel point je suis à fleur de peau, comme si je craignais que l’on me prenne pour m’enfoncer la tête dans l’eau.

Je vois la pâleur de Liam, son regard inquiet, cette pointe de culpabilité et trop de choses qu’il ne devrait plus avoir a porter, surtout aujourd’hui et encore moins par ma faute. Je m’en veux tellement de tout gâcher. Combien de fois m’avait-il parlé de ses rêves de vagues, de liberté sur une planche, de plages paradisiaques ? Et cela même quand il avait à peine la force de parler et que le seul bruit de liquide était celui du goute a goute de tout ce qu’on injectait dans ses veines ? Et moi, combien de fois avais-je caressé l’espoir d’être a ses cotés quand il pourrait enfin les vivre, alors que je devinais déjà, a l’époque, que ca ne serait jamais, pour moi, plus que des pensées agréables pour tromper les angoisses liés a la maladie. Dans ma tête et sur les photos, la mer ne semblait pas aussi dangereuse.

Je m’en veux un peu de mentir a Liam, surtout qu’il se révèle d’être d’une prévenance touchante alors que je suis en train de ruiner sa journée avec Thea.

« C’est moi qui aurais dû anticiper, ne t’excuse pas, s’il te plait. »

Je ne dis rien quand il émet l’idée que je doive manger. Rien que d’imaginer des aliments, je sens mon estomac se nouer et j’ai la nausée. Je ne suis pas sûre de rien pouvoir ingurgiter.

« Ca… ca va aller… »

C’est un autre trouble qui survient alors que je me sens enlacée pour me guider vers Thea. Il y a quelque chose d’assez étrange dans cette situation : jusqu’à maintenant, c’est moi qui soutenais Liam, aussi ce retournant est très déstabilisant. Impossible de savoir exactement ce que je pense alors que mon cerveau a cette manie de refuser de fonctionner correctement dès que je suis trop près de lui et pour le coup, on peut difficilement faire plus près.

« T’es toute pale maman ? Ca va ? Qu’est ce qui se passe ? Tu veux un sandwich ?»

La petite voix aigüe de ma fille me vrille le cœur. Thea aussi s’inquiète, avec une mimique qui fait qu’elle ressemble vraiment a son père. Je me force a lui sourire comme a chaque fois que la journée n’a pas été bonne mais que je veux la préserver des difficultés des adultes. C’est avec un geste tendre que je tente de la rassurer :

« Ca va ma puce, maman n’a juste pas l’habitude de la voiture mais ca va vite passer. Garde les sandwichs pour plus tard et cache les biscuits apéritifs, sinon papa va tout manger avant le piquenique. On va passer une super journée et bien s’amuser ! »

Je me force a un enthousiasme que je ne ressens pas. J’ai peur pour elle, j’ai beau me répéter que Liam sait ce qu’il fait, qu’en plus, il est pompier et pourra gérer si les choses tournent mal, c’est difficile de lutter contre des émotions aussi irrationnelles que la terreur. Mon sourire se fait plus sincère quand Liam sort presque triomphalement la crème solaire et se met à faire de la prévention digne d’un professionnel de la plage :

« Heureusement que tu es là pour nous sauver pompier Liam… »

Je me retrouve sur le banc a coté de Thea a rire comme une enfant alors qu’il me met de la crème sur le nez. Cela fait bien glousser notre fille qui n’en revient pas que papa « ait fait ca ». A sa question, je fais signe a Liam que ca va et lui glisse un nouveau « merci » avant qu’il me surprenne avec son geste. Je n’ai pas l’habitude qu’on prenne soin de moi. Mon travail fait que je prends soins des autres et ca ne va que dans ce sens. A part maman, je pense que je compte sur les doigts d’une main les gestes d’attentions que j’ai pu recevoir et presque tous viennent de celui qui s’est mis près de moi. Autant dire que je n’étais pas tout à fait prête a ce qu’il étale en douceur la crème sur mon visage. Ce n’est rien, pas une caresse, pas un geste tendre, c’est juste de la crème solaire, pour autant, mon cœur s’affole un peu trop et pour autre chose que le bruit des vagues.

Au moins, ca a le mérite de me redonner un peu de couleurs. Après un petit regard hésitant et une légère raideur, je décide de fermer les yeux et le laisser faire, un peu trop troublée par ce simple contact pour ne pas appréhender mes réactions quand il parle de s’occuper de mon dos. Soudain, je ré-ouvre les yeux, me souvenant qu’il ne doit ABSOLUMENT pas se pencher sur mon dos. Sagement, je tente de botter en touche :

« Tu sais, ca ne sera peut-être pas nécessaire. Je n’ai pas de maillot de vais surement rester habiller. »

Mais c’est mal connaitre le pompier qui a été prévoyant. Thea ne tient plus en place et j’acquiesce a la proposition de nous installer en cachant l’épreuve que cela représente pour moi. Je suis obligée d’accepter la main de Liam pour me relever et suis incapable de la lâcher alors que l’on va descendre sur la plage. Je m’agrippe a lui comme si ma vie en dépendait, essayant de me concentrer sur la joie de Thea. Tout est nouveau et elle ne cesse de pousser des petits cris de joie a chaque découverte. Elle est plus que ravie d’être ici et, malgré ma peur, j’en tire un grand bonheur qui s’entend quand je souffle à celui qui doit me supporter :

« Je crois qu’elle a hérité de ton amour pour la plage… je ne l’ai jamais vue aussi heureuse de toute sa vie. »

Le soleil a donné des envies de faire comme nous à pas mal de monde, mais nous n’avons pas trop de difficultés a nous trouver un petit coin pour poser nos sacs. Pendant toute l’installation, je fais attention de toujours tourner le dos a l’eau, me préservant d'une crise de panique comme si ne pas voir l'eau était la solution. J’aide comme je peux Liam a mettre le parasol et Thea a mettre la fouta au sol, que l’on bloque avec les sacs. Son papa était sérieux pour les maillots de bain. Il en sort triomphalement deux qui ont encore l’étiquette. Oh Mon Dieu ! Cela me semble… enfin, celui qu’il me tend n’a pas l’air d’avoir beaucoup de tissu. Je le remercie autant que je le peux malgré mes joues roses a l'idée d’être aussi peu vêtue.

On l’abandonne le temps de trouver les toilettes pour se changer « entre femmes ». C’est une délicate attention d’avoir pensé a ce cadeau, même si je pense que Liam me voit avec plus de formes que j’en ai. Même si je n’ai jamais retrouvé mes seins d’avant la grossesse, je suis loin de remplir le haut et dois faire quelques nœuds pour resserrer le "vêtement". Sans ca, aucune garantie de ne pas finir la journée avec le bas sur les chevilles et Thea arrêtera surement de dire qu’on voit « mes gougouttes » a chaque fois que je me penche. Le résultat dans la glace n’est pas convaincant, je crois que je n’ai jamais été aussi peu vêtue en dehors de chez moi. Je détache mes cheveux qui sont assez longs pour cacher la marque de fer rouge que j’ai dans le dos en espérant que cela suffise.

Je ne suis pas très a l’aise quand on quitte les toilettes et retourne a notre « coin », me sentant affreusement nue. Je préfère prévenir Liam qui a tendance a aimer me chahuter avec un petit air gênée :

« Je te préviens, tu n’as pas le droit de moquer… »

Thea n’a pas de soucis de pudeur et saute dans les bras de son père en le couvrant de baiser pour le remercier pendant que je sors la crème et attrape la mini nous qui se débat pour la forme.

« A ton tours Melle la sirène !! »

Je lui mets de la crème sur le nez comme moi tout a l’heure et badigeonne toutes les parties de son corps découvertes avec l’aide d’un papa complice. J’ai a peine fini qu’elle est déjà en train de sortir des jouets pour tenter un château. Bon moment de diversion pour une attaque sournoise de crème solaire sur un papa qui n’était pas sur ses gardes.

« Je crois que je t’ai eu M le Pompier. Plus vite je t’aurais badigeonné, plus vite tu pourras aller montrer ton univers a Thea pendant que je garde les affaires. »

C’est sans lui demander son avis que je lui retourne délicatement la gentillesse qu’il ma faite. Je sais que profiter de la petite sans moi est surement ce qu’il souhaite le plus et espère lui faire plaisir. Je me sens un peu trop fébrile d’étaler la crème dans son dos et redécouvrir son corps qui a tellement changé depuis le cancer. En fait il faut vraiment chaud sur cette plage. Heureusement, un vent de fraicheur arrive vite avec une autre paire de mains. Thea veut être celle qui va « prendre soins de papa » et je ne peux faire qu’inspectrice des travaux finit en grimaçant devant le massacre qu’elle fait du tube. Elle y met tellement de cœur, difficile de lui en vouloir. Je me penche vers Liam pour lui chuchoter :

« Je te rachèterai de la crème… promis… par contre je pense que tu pourras faire des glissades même sur le sable tellement tu es enduit…»

Vamos a la playa

Emma Lockwood et Liam Keller

“La famille c'est une richesse incroyable, ça donne des outils pour pouvoir affronter les moments extraordinaires, les moments plus difficiles, les hauts, les bas.” - Céline Dion

Le trajet en voiture s’était soldé par une réaction étonnante. Lui qui pensait faire plaisir à tout le monde avec cette sortie à l’océan… Il s’était planté en beauté en se fourrant le doigt dans l’œil jusqu’au coude ! Il avait eu du mal à assimiler l’attitude d’Emma, pensant à tort que changer de plage pourrait être une bonne idée, n’imaginant pas une seule seconde que celle avec qui il avait tant parlé de belles et grosses vagues puisse craindre à ce point cet élément. Heureusement, elle l’avait rassuré, alors il l’avait soutenu du mieux possible en pensant que son malaise était uniquement dû à ses yeux bandés. Combien de temps mettrait-il à comprendre la vérité ? L’avenir nous le dira.

« Ce bien vrai ça, vous avez de la chance de m’avoir ! », le sourire extra bright qui illumina son visage au moment où Emma fit remarquer qu’il était le sauveur de ses dames chassa tous les doutes qui s’étaient installés face à la pâleur de la jeune femme. Riant de bon cœur à son faux orgueil surdéveloppé, il décida d’appliquer immédiatement ses conseils en matière de protection solaire.

C’est avec un soin tout particulier qu’il avait appliqué la crème sur le visage de la brune, appréciant les contours de sa mâchoire, la douceur de sa peau qui glissait sous ses phalanges tandis que ses prunelles ne quittaient pas d’une semelle la destinataire de son application. Quand Emma ferma les yeux, il se surprit même à totalement oublier où il se trouvait, souriant doucement de la voir si détendue, et se rapprochant en basculant légèrement son buste, comme si, tel un aimant, il était indubitablement attiré dans sa direction. Ses mains s’étaient positionnées sur la nuque de la demoiselle, ses doigts effleurant la naissance de ses cheveux à l’arrière de son crâne. Il ne lui restait que quelques centimètres à combler et leurs lèvres se rencontreraient…

Tout lui semblait bien silencieux d’un seul coup, puis il entendit Théa s’extasier devant un cerf-volant fendant le ciel. Liam venait de retomber sur terre, alors il se recula, mettant à nouveau une distance raisonnable entre lui et Emma avant de la prévenir qu’il s’occuperait de protéger le reste de sa personne quand la nécessité se présenterait.

Quelque peu déstabilisé par ses gestes précédents, il ne répondit pas immédiatement à la remarque qu’elle lui fit concernant le vêtement de bain qu’elle n’avait pas, et il fallut attendre qu’elle le remercie en lui disant n’avoir pas prévu de maillot pour la petite pour qu’il percute enfin ce qu’elle avait dit. Il lui assura de ne pas s’inquiéter. Aujourd’hui, c’était lui qui s’occupait de tout, et par tout, il entendait également les tenues adéquates pour une sortie à la plage !

Une nouvelle fois, Théa était surexcitée. Il était grand temps de rentrer dans le vif du sujet, et Liam attrapa d’une main les sacs contenant tous les trésors pour cette journée, offrant son autre bras à Emma qui semblait encore légèrement fébrile. C’est ainsi qu’ils descendirent dans le sable ; les deux adultes bras dessus bras dessous, regardant la petite courir à droite et à gauche en découvrant chaque merveille qu’un tel lieu a à offrir. Liam ne put s’empêcher de penser que, de l’extérieur, ils devaient ressembler à une véritable famille venant profiter d’une journée ensoleillée.

« A ton avis, ce qui lui plaît le plus, c’est la plage ou le fait qu’on soit à la plage tous les trois ? », il avait resserré la prise de son bras sur la main d’Emma dans un geste instinctif tout en la regardant, avant de reprendre, « En tout cas, pour ma part, je suis content que vous soyez là. Toutes les deux. Merci de nous avoir accompagnés, ce moment, je ne pourrais jamais l’oublier. ». Il était plus que sérieux tandis que son visage pivotait en direction de la tête blonde qui leur montrait une envolée de mouettes au loin.

Liam nageait littéralement dans le bonheur. L’inquiétude d’Emma semblait s’être envolée, la joie de Théa lui paraissait intarissable et lui, il ne faisait que sourire.

« Et maintenant… Surprise ! Aucune journée à la plage ne peut se faire sans maillot de bain. Vous trouverez un endroit au calme pour vous changer par là-bas, en attendant, je finis de préparer le campement. », il les regardait s’éloigner, sa risette toujours présente alors qu’il retirait son tee-shirt pour le fourrer dans un sac.

Tout était prêt : parasol, grands draps de bain pour s’étendre, glacière remplie de bouteilles d’eau et de jus de fruits, seaux et pelles pour des constructions sableuses et brassards pour Théa !

Il était en train de boire une gorgée de flotte quand les deux femmes de la journée revinrent près de lui. Liam eut juste le temps de refermer la bouteille qu’il réceptionna un colis conséquent dans les bras, Théa lui sautant dessus avec toute l’énergie de sa jeunesse.

« Tu as vu comme on est jolie comme ça ! Hein papa, maman s’est la plus jolie maman du monde, regarde ! », Théa venait de lui hurler dans les oreilles tout en plaquant ses paumes sur ses joues pour lui faire tourner le regard en direction d’Emma.

« C’est évident. », il n’avait fait que murmurer avant de reprendre avec une voix plus assurée, « Tu es la petite fille la plus adorable de l’univers, tu tiens ça d’elle. ». Redéposant la petite au sol en lui ébouriffant gentiment les cheveux, il retourna son attention sur Emma quand elle prit la parole.

« De quoi veux-tu que je me moque ? Tu es superbe. », son regard devait parler pour lui, et c’est très honnêtement que ses mots franchirent sa bouche alors qu’il la détaillait sans faire preuve de beaucoup de discrétion. Planté les pieds dans le sable, il peine à détourner les yeux jusqu’à ce que l’opération "badigeonner l’enfant" soit lancée.

Une fois la mission couronnée de succès, il observe sa fille déballer les jeux emmenés et commencer à monter la tour d’un château. Puis il sursaute en sentant des mains se poser sur son épaule, la fraîcheur de la crème solaire lui étant destinée le faisant frissonner. Ça ou le fait que ce soit Emma qui opère un rapprochement physique ? Allez savoir !

« C’est une belle excuse que tu as trouvée là. Comme ça, tu peux tâter mon… Comment tu as appelé ça tout à l’heure ? Ah oui, mon rembourrage ! », il se marre comme un crétin en se hissant doucement vers elle pour lui faciliter l’accès à son dos. Son humour lui permet de chasser les quelques idées qui germent dans son esprit alors que les doigts de la brune parcours sa peau, aidés également par l’arrivée tonitruante d’une petite tête blonde voulant à son tour protéger son père du soleil.

Liam rit en voyant la quantité astronomique de crème utilisée pour son torse, « Ne t’en fais pas pour ça, j’en ai plein les placards à la maison, et au moins, comme ça, je brille de mille feux ! ». Il s’était levé pour tourner sur lui-même comme s’il était sur un catwalk, « Merci ma puce, tu as fait ça comme une véritable professionnelle, grâce à toi, zéro coup de soleil à l’horizon ! ».

Roulant des mécaniques avec exagération, il avait rejoint sa fille pour s’agenouiller sur le sable afin d’être à sa hauteur, « À partir de maintenant, c’est toi qui décides du programme. Par quoi veux-tu commencer ? ». Cette journée, elle lui était destinée, mais la petite semblait hésiter. Il y avait tant à faire et tout était nouveau. « Si tu veux, on peut se rapprocher un peu de l’eau et partir à la recherche de jolis coquillages pour décorer le futur palais qu’on va construire. ». L’idée enthousiasmait Théa qui se levait, déjà prête à partir en exploration.

« Tu nous accompagnes ? On ne sera pas trop de trois pour cette activité et les affaires ne risquent rien, on gardera un œil dessus au loin. », Liam n’eut pas le temps d’écouter la réponse qu’il était tiré par la main, Théa s’impatientant rapidement, « Met un tee-shirt avant de nous rejoindre, on ne t’a pas mis de crème ! ». Sa dernière phrase fut dite en riant tandis qu’il attrapait délicatement les épaules de sa fille en se penchant, « Alors petit monstre, on est pressée de mettre les pieds dans l’eau ?! ».

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