C'est pas pour moi, c'est pour une amie

Je suis très mal à l’aise d’être dans un commissariat. J’ai l’impression que c’est écrit en lettre rouge au-dessus de ma tête que j’ai de faux papiers et que je suis obligée de voler des médicaments a l’hôpital. Je sais bien que c’est faux, que je suis habile pour donner le change. Tout au plus, on verra une jeune femme un peu perdue et intimidée par l’activité de l’endroit. Pour autant, ça ne serait pas pour Juliette, je n’aurais jamais affronté ma peur de venir ici surtout après les affirmations de Maitre Lebenstraum sur le degré de corruption de la police.

L’accueil n’a pas été chaleureux mais je ne démords pas. Liam m’a donné un nom, celui d’un inspecteur : Leonardo Baxter, c’est lui que je veux voir et personne d’autre. Si Liam a confiance en lui, c’est que je peux le faire aussi. Le policier en face de moi semble agacé que je ne veuille pas aller avec des agents « plus qualifiés » pour prendre plaintes, dépositions etc… Il ne sait même pas pourquoi je suis là, mais fait barrage, alléguant tours a tours que l’inspecteur Baxter est absent, ou occupé, ou ne reçoit pas de visite sans rdv. Il finit par me dire de patienter sans cacher son animosité devant mon entêtement et me fait bien comprendre qu’il ne fera rien de plus pour moi. En gros c’est attendre pour rien ou céder selon lui.

Je soupire et vais m’assoir sur les sièges à la propreté douteuse qui jalonne le mur en face d’un accueil qui n’a d’accueillant que le nom. J’attends sagement en observant les vas et viens, la disposition du lieu, écoutant les brides de conversations, a l‘affut d’indices pour me conduire a celui que je devais voir. De ce que je comprends, les inspecteurs ont leur espace dans le fond de l’open space des agents a droite. Dès que policier est occupé a se débattre avec sa machine a café, je me faufile discrètement vers la où je pense trouver le bureau de l’inspecteur. Ce n’est pas malin du tout, mais je n’ai jamais prétendue l’être quand j’ai une idée derrière la tête. Je parcours rapidement les bureaux du fonds, a la recherche d’une plaque avec un nom. Je souris en trouvant, enfin, celui que je cherche alors que j’entends le cerbère de l’entrée demander à ses collègues s’ils ont vu une petite brune partir. Ça sent le roussi.

Je frappe un peu timidement a la porte mais n’attends pas qu’on me dise d’entrer pour m’engouffrer dans la pièce. Le « elle est la » qui vient de l’accueil me laisse a présager que j’ai peu de temps et je referme vivement la porte avant d’aviser qu’il y a un homme dans le bureau qui a l’air de se demander ce que je fais là. Pour le coup, je me poserais presque la même question. Avec précipitation, guettant nerveusement la porte, j’essaye de m’expliquer :

« Inspecteur Baxter ? Je… je suis désolée de cette entrée mais… enfin déjà bonjour… je pense qu’on ne va pas me laisser beaucoup de temps et Liam m’a dit que je pouvais avoir confiance en vous. Mon amie a disparue, je suis certaine qu’elle a été enlevée et personne ne m’eco.. »

La porte s’ouvre et je me fais agripper douloureusement le bras comme si j’étais une terroriste. J’ai un hoquet de douleur comme de surprise de ce geste brutal.

« Pardonnez moi inspecteur, cette femme s’est introduite de force. Je m’occupe d’elle… »

Ce je m’occupe d’elle ne sonne pas « je vais prendre sa plainte » et je sens qu’il me traine hors du bureau. Pas la peine de dire que je n’ai pas vraiment le gabarit de lui résister pendant qu’il me dit qu’il espère que je n’ai pas de quoi payer la caution et qu’il va me faire passer le pire séjour du monde en garde a vue. Pour le moment, je tente toujours de me faire entendre pour Juliette :

« Juste quelques minutes !! Elle s’appelle Juliette Mckenzie !! S’il vous plait inspecteur… il faut l’aider !! »

Je suis en panique mais mon obstination m’empêche de céder à la peur. Je sais ce que je risque, mais le sort de Juliette me semble autrement plus préoccupant pour le moment. Entre un drame imminent et un qui est en train d’avoir lieu, je sais ou est mon urgence. Ce qui s’est passé chez moi prouve que non seulement j’ai mis le doigt sur une vrai piste, mais, qu’en plus Juliette est bien en danger.

Impossible de résister a la poigne du policier qui me tire les larmes aux yeux alors que me mène hors du bureau avec des promesses peu engageante. En désespoir de cause de ne pouvoir lutter pus, consciente que ce n’est qu’une bouteille a la mer, j’essaye de supplier et donner le plus d’informations possible.

Contre toutes attentes, alors que je suis à moitié dehors du bureau, le policier se fige pendant que l’inspecteur lui demande d’arrêter. Je redresse la tête vers le jeune homme avec un regard trahissant autant ma surprise que mon appréhension d’un espoir déçu. Muette, j’écoute l’échange, priant intérieurement, pour Juliette, que l’on me donne une seule petite chance de dire les choses. Finalement, le policier doit battre en retraite, non sans m’adresse un regard noir qui me donne un frisson, pour autant, il nous laisse et je me sens presque hébétée de ce rebondissement.

« Mer.. merci… »

J’opine du chef a sa proposition de m’assoir. Tout en me massant le bras, qui est bien marqué tellement son collègue m’a serrée, je prends sagement place sur le siège.

« Je… je veux bien un verre d’eau s’il vous plait…et… je suis désolée pour mon entrée mais j’ai vraiment besoin de votre aide. Liam m’a dit que je pouvais vous faire confiance.»

J’acquiesce vigoureusement de la tête quand il me demande de confirmer que je viens pour une disparition.

« Oui. J’ai… j’ai ma meilleure amie, Juliette Mckenzie, qui a disparu, cela va faire 3 semaines et avant que vous me parliez de fugue, je voudrais que vous sachiez que je ne serais jamais venu vous importuner si je n’étais pas absolument sure qu’il lui est arrivé un drame. »

Tout en parlant je sors de mon sac un dossier bien rempli avec maniaquerie, dedans, des photos de Juliette, des imprimés nos derniers messages, une chronologie rigoureuse de ses derniers déplacement connues, de ses fréquentations que j’ai retrouvées… le tout fait avec toute cette maniaquerie inconsciente qui est la mienne.

« Je me suis permis de vous faire récapitulatif. Juliette était une personne isolée sur NY, son ex époux est toujours en prison dans un autre état. Elle m’adressait en moyenne une 20 aines de messages chaque jour. Elle avait rencontré quelqu’un dans le centre pour femmes victimes de violence qu’elle fréquentait. Le dernier message disait qu’elle allait le rejoindre là-bas et qu’elle me raconterait tout dans la soirée, sauf qu’il n’y a rien eu depuis… »

Tout en parlant je lui montre les copies d’écran imprimées pour étayer mes propos, sans prendre la peine de cacher le tremblement de mes mains tant je suis inquiète pour elle.

« Il n’y a rien sur ses comptes de réseaux sociaux non plus depuis… »

Autres faits inquiétants quand on voit la manie de Juliette de s’exposer. Elle avait du mal à comprendre mon besoin de ne surtout rester invisible et loin d’internet.

« J’ai été dans le centre pour essayer de trouver l’homme qu’elle voyait en espérant avoir des informations. Il doit forcément savoir quelque chose et c’est étrange qu’il ne se soit pas manifesté. J’ai pu échanger avec le cofondateur de l’association, Mr Cardinal. Il m’a affirmé qu’il était seulement 4 hommes a travailler dans le centre, dont lui et l’autre fondateur et qu’il ferait tout ce qu’il peut pour aider la police si besoin. »

La aussi j’ai noté les noms des hommes, l’adresse du centre. Tout est consigné avec minutie, ma façon a moi d’essayer de me sentir utile pour sauver mon amie. Je suis un peu gênée pour la suite et rougie sans trop oser tourner la page. En fait, je ne sais pas comment expliquer le dernier document.

« Je… hum.. j’ai été voir chez Juliette. Bagages, vêtements, chargeur de téléphone et tous les objets sans lesquels elle ne serait jamais partie, tous étaient la mais… mais il y avait autre chose… elle… elle a pris des photos de l’homme qu’elle voyait, sauf qu’elle avait une conception du cadrage bien a elle… »

Je suis écarlate et je préfère le laisser découvrir lui-même les copie de photos qui représentent seulement des fesses d’homme avec un grain de beauté. Moi je ne sais plus trop où me mettre.

« J’ai l’impression aussi. Merci encore inspecteur. »

Mon visage s’illumine malgré moi dès qu’il me parle de Liam et m’assure qu’il va faire son possible. Sans les conseils du pompier, je serais complétement perdue et, surtout, je n’aurais pas dépassé l’accueil de ce commissariat. Trouver une personne bienveillante et qui semble sincèrement vouloir m’aider sans passé au crible « qui je suis » est un soulagement sans nom.

Ma nervosité et ma nature maniaque reprennent vite le dessus et je pars dans le vif du sujet a grand renfort de tout ce que j’ai réussi a compulser sur la disparition de Juliette, serrant les fesses pour qu’il ne me demande pas ou j’ai trouvé les photos de celles de son « amoureux ». Je suis affreusement gênée, d’ailleurs, lorsqu’il les regarde. Je ne sais pas où poser mes yeux tellement je suis mal a l’aise de ce genre de clichés. Même si l’inspecteur Baxter fait fort jeune, il écoute patiemment mon explication et ne me renvoi pas au visage la théorie de la fugue que tout le monde veut croire. Bien au contraire. Néanmoins, le début de sourire, lorsqu’il m’annonce me croire se meurt rapidement en m’annonçant qu’elle n’est pas la première. Comme une petite fille qui a mal compris, je répète bêtement un :

« Pas la première ? »

C’est aussi idiot et naïf de ma part de ne pas avoir pensé, avant, que Juliette n’était pas la seule. Je reste à observer le jeune homme regarder les dossiers que j’ai compulsé pendant que j’essaye de réaliser la porter de ses mots. La théorie d’un amoureux un peu fou s’étiole devant une autre plus monstrueuse que je refuse d’appréhender.

« Il… il y en a eu beaucoup ? Comme Juliette ?»

Je rosies quand il me complimente. Je n’ai pas l’habitude de ce genre de chose et je n’arrive qu’a bredouiller un merci qui me donne un air d’adolescente timide.

« C’est… c’est gentil… mais je pensais aussi aller faire du bénévolat au centre d’aide pour femme battu pour voir si je retrouve « l’amoureux » de Juliette. Ca me parait étrange qu’aucun homme n’ait réagi a sa disparition. J’ai aussi prévu aller interroger M Jackson Blake. M Cardinal m’a dit ou il travaillait quand il n’était pas au centre, peut être en saura t-il plus. »

J’e suis a me demander si on je ne devrais pas demander des photos des fesses de tous ses messieurs pour être sur de leur innocence mais j’avoue que ca serait extrêmement… dérangeant.

« Enfin, si cela ne vous gêne pas dans votre enquête…. Je veux vraiment aider Juliette n’a que moi vous savez. »

Je le regarde avec un air suppliant. Je serais incapable de rester sur le banc de touche. Je serre les poings et prends une grande inspiration avant de me risquer a la question qui me fait peur :

« Vous… vous pensez qu’elle est encore vivante ? »

Je reste sous le choc de comprendre que Juliette est peut-être la victime de quelque chose de plus grand qu’un enlèvement isolé. Ma question sonne un peu fébrile et souligne bien ma façon un peu innocente de voir le monde. Si j’avais rosi au complément de l’inspecteur, je n’en pâli que plus quand il me répond. Ça réponse sonne comme une mauvaise introduction de film, sauf que je ne pense pas que cela sa résoudra aussi facilement. Je bredouille sans réussir à cacher mon incompréhension :

« Mais… pourquoi des ferait il ca? »

Rapidement, une autre question fuse et celle l’a fait encore plus peur que la première :

« La personne qui s’occupe de l’enquête est-elle… »

Je me mords la lèvre. La marque a mon bras et les ennuis que j’ai failli avoir en arrivant ne me tranquillise pas assez pour dire les mots. Corrompu ? Je m’en foutiste ? Du genre qui n’aurais pas accepté, comme l’inspecteur en face de moi, de recevoir une personne comme moi ? A la place je me contente d’un prudent :

« … enfin comme vous ? »

Je ne me rends pas compte du regard désespéré que je lui adresse à ces mots tellement je redoute sa réponse. Je ne sais absolument pas comment marche un poste de police mais je suis sûre que je voudrais que cela soit l’inspecteur Baxter qui s’occupe de cela. Dans tous les cas cela ne fait que confirmer ma détermination a ne pas m’arrêter en route. Juliette, et les autres femmes qui sont comme elles. Sa mise en garde sonne un peu trop comme celle de maman et les conseils de Liam, mais il m’en faudra plus pour laisser mon amie a son sort. Je prends avec reconnaissance son numéro.

« Merci. J’entends ce que vous me dites mais Juliette n’a que moi et elle a déjà tellement souffert dans sa vie. Quoiqu’il se passe, elle ne mérite pas ca. Votre meilleure amie aurait disparue et serait en danger, vous feriez quoi, vous ? »

J’essaye de réfléchir au fait qu’aucun ne soit découvert. Est-ce une bonne chose ou pas ? En fait, je ne sais que trop bien le nombre de méthode pour faire disparaitre complétement un corps sans laisser de trace.

« Je veux aider inspecteur Baxter. Je ne suis pas la seule. M Cardinal du centre de femme battues est motivé aussi. Je compte bien aller parler a toutes les personnes de sexe masculin de ce centre pour savoir s’ils en savent plus et me faire embaucher là-bas. C’est le dernier endroit au Juliette m’a dit aller et avoir rencontrer un conjoint qui semble s’être volatilisé avec elle… »

Un qui a un grain de beauté sur les fesses. Grand Dieu, pourquoi n’a-t-elle pas pris autrement cet homme. Victime ou coupable, il est forcement une clé pour comprendre ce qui s’est passé., C’est évident.

« Par hasard, vous sauriez comment les autres ont disparu ? »